lundi 2 février 2009

brute incursion (5/5)

brute incursion (5/5)




La librairie. Elle est là, j’y entre. Je cherche seul mon bouquin avant de me renseigner. Le gars me dit :

- Non, vraiment. Rien.

- Tant pis, merci, au revoir.

Je suis fatigué, je veux rentrer. J’y vais.

Mon téléphone sonne, un vieux motorola. Un collègue me propose un café. J’accepte. Il me dit :

- Dans un quart d’heure devant la fnac.

J’ai mal aux jambes, je vais prendre le tram. L’arrêt est à deux pas.

Je contourne par la rue Victor Hugo. Je suis surpris par une meute qui s’agite. Putain de clébards. Des gros chiens, qui bougent, qui reniflent et qui puent. Avec des allemands ivres autour, qui puent également. Des cannettes de Kronenbourg gisent un peu partout. Elles roulent dans le caniveau. Je regarde loin devant. L’un me dit :

- Pièces pour moi !

Je lui réponds non de la tête et je passe.

J’attends le prochain tramway. Une grande affiche indique qu’une Toyota coûte 14990 euros. Une fille au pull orange me donne un journal gratuit. Je refuse. Le tram arrive, klaxonne. Des vieux descendent doucement, un groupe monte et le grand crache une glaire avant de rentrer. Je m’éloigne. Je vais m’asseoir à côté d’une jeune fille que je cherche du regard. Plus que quatre arrêts. J'observe les rails, les fils électrique. C’est vrai que c’est typique le tramway. Une personne seule donne à voix haute une explication puis joue de l’harmonica. C’est pénible. Elle passe dans les rangs avec une boîte en fer. Je tourne la tête. J’attends en observant au dehors.

C’est mon arrêt. Je descends et tombe directement sur une paire de seins. Une grande affiche indique la leçon n°51 d’Aubade. Une autre fille au pull orange me donne un journal gratuit. Je refuse à nouveau. Je regarde furtivement le gros plan avant de retourner devant la fnac. Je suis à l’heure. C’est bondé. Des groupes, des couples, des jeunes, des vieux, du coca, des pizzas, des sacs, des fringues. Dans le coin le clochard dort toujours, il y a deux pièces dans sa casquette. J’attends mon ami. Une fille m’accoste pour sauver la planète. Elle est laide. Elle me dit :

- Greenpeace. Vous connaissez ?

Je lui réponds :

- Oui, mais ça ne m’intéresse pas.

Elle part voir d’autres passants. Quel K-way pourri.

Mon camarade arrive. On va à la brasserie boire un café, Au Bureau. Je suis éreinté. J’abrège. Je file.

Je regarde mes pieds pour rentrer. Il pleut un peu. J’arrive devant ma porte Putain de serrure. Je force et parviens à ouvrir. Je prends un cachet et j’allume la télé. Je m’endors. Je n’ai pas mon livre. Il est rare.

4 commentaires:

Amiral Potiron a dit…

Très bon travail.

J'avais gribouillé une vague trilogie il y a quelques mois, et l'un des épisodes abordait plus ou moins les mêmes thèmes (la triste FNAC, en particulier).
Il faudrait multiplier les variations autour de ces thèmes, il y a toujours du bon à chevaucher contre la laideur.

Si ça t'interesse:

http://www.culturalgangbang.com/2008/12/un-aigri-dans-la-ville-ii-illustration.html

schock a dit…

IL est excellent ton texte.

Ce qui est effrayant, c'est la quasi similarité des funestes trajets...Où qu'on soit, dans n'importe quel hyper-centre, on y retrouve les mêmes saletés. l'uniformité, c'est vraiment la mort, comme dirait l'autre !

BEBOPER a dit…

Très bon texte, en effet. j'adore "Une fille m’accoste pour sauver la planète"...
C'est vrai ce que dit l'Amiral, on a tous l'impression de connaître cette ville (j'ai cru à Lyon pendant longtemps, mais le tramway n'y finit pas à la Fnac, pas encore). On nous a construit une sorte de cadre unique (du moins si on en reste aux boutiques)qui se répand sur l'Europe comme une maladie. Désespérant (j'ai observé à Prague, des touristes fascinés par des boutiques qu'on trouve partout ailleurs, et qui n'avaient pas un regard pour les façades "à sgraffites", superbes, peintes au XVIIème siècle par des ploucs qui ne connaissaient pas la Fnac).

schock a dit…

merci.;)
Et j'ai peur que tout ce cirque n'aille en s'améliorant !